La procédure de licenciement pour motif personnel
La rupture d’un CDI par licenciement pour motif personnel est un mode de rupture du contrat de travail fréquent. La DARES au 1er trimestre 2024 dénombre près de 240.000 licenciements individuels.
La convocation à l’entretien de licenciement pour motif personnel
Un délai minimum de cinq jours ouvrables doit séparer la présentation en recommandé ou la remise en main propre de la lettre de convocation à l’entretien et la date de l’entretien préalable. C. trav., art. L. 1232-2 à C. trav., art. L. 1232-4 ; C. trav., art. L. 1232-7 ; C. trav., art. D. 1232-5.
Le délai à l’entretien de licenciement pour motif personnel est confirmé par la jurisprudence : vous devez conserver 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre de convocation en recommandée ou de remise en mains propres contre récépissé et la tenue de l’entretien.
Le salarié convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement doit disposer d’un délai de 5 jours « pleins et ouvrables » pour préparer sa défense (Cour Cass, 20 décembre 2006).
Le non-respect du délai de cinq jours ouvrables séparant la présentation au salarié de la lettre de convocation et l’entretien préalable au licenciement constitue une irrégularité qui entraîne nécessairement un préjudice pour le salarié.(Cour Cass, 28 janvier 2015).
En principe vous n’avez pas à mettre dans le courrier les raisons de licenciement pour motif personnel, mais vérifiez ce qu’écrit votre convention collective !
Mais dans cet arrêt du 9 janvier 2013, la convention collective imposait de notifier par écrit le motif d’une mesure disciplinaire avant que celle-ci rentre en application. Cette clause impliquait donc d’indiquer le motif de la rupture dans la convocation à l’entretien et l’employeur qui n’avait pas respecté cette obligation conventionnelle s’est vu pas le tribunal infligé un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Lettre de licenciement pour motif personnel : LRAR préférable mais pas obligatoire
La cour de cassation le 16 juin 2009 a précisé que l’envoi d’une lettre LRAR visait à éviter toute contestation sur la date de notification de la rupture mais que rien n’interdit de remettre la lettre de licenciement au salarié en main propre. La cour de cassation confirme le 23 octobre 2013 cette position et admet que la lettre peut être remise par le conseiller du salarié sans que cela invalide le licenciement.
L’indemnisation du licenciement pour motif personnel
Une indemnité légale de licenciement pour motif personnel est :
• due à compter d’un an d’ancienneté (c’est la loi donc, cela s’impose même si votre convention n’a pas toujours encore été mise à jour mais c’est l’indemnité légale qui s’appliquera même si elle est moins avantageuse)
• 1/4 de mois par année d’ancienneté au minimum (plus si votre convention collective prévoit plus) + 2/15e de mois par année d’ancienneté au-delà de 10 ans d’ancienneté.
• En cas de faute lourde, prévoir le paiement des indemnités compensatrices de CP pour les périodes de références déjà closes. La faute lourde n’affecte pas les droits du salarié pour cette période.
Décompte de l’ancienneté dans le cas du licenciement pour motif personnel
• L’ancienneté s’apprécie à la date d’envoi de la lettre de licenciement pour motif personnel depuis la loi de modernisation sociale.
– Prise en compte des contrats antérieurs : oui pour le CDD dont il est entièrement tenu compte, oui partiellement s’il était en intérim dans la limite de 3 mois.
– Prise en compte des périodes de suspension de contrat : sont décomptées dans l’ancienneté les périodes d’absences assimilées à temps de travail effectif (congés payés, congé maternité, absence à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle). En revanche ne sont pas prises en compte : les absences pour maladie sauf dispositions conventionnelles plus avantageuses, les absences pour congé parental sont prises en compte pour moitié pour le calcul de l’ancienneté.
Tout savoir sur la durée congé maternité
Le licenciement précédé d’une mise à pied conservatoire
Ne pas confondre mise à pied conservatoire et mise à pied disciplinaire. La mise à pied conservatoire est là pour prévenir une situation de danger ou de désordre dans l’entreprise en raison d’une faute commise par un salarié.
• La mise à pied conservatoire est en quelque sorte une position d’attente qui permet de suspendre le contrat d’un salarié dans l’attente de l’exécution de la procédure disciplinaire. En pratique, elle est mise en oeuvre quand on a affaire à une faute grave voire lourde.
L’employeur qui notifie une mise à pied conservatoire bénéficie d’un délai de réflexion avant d’engager une procéder une procédure de licenciement mais il doit pouvoir s’en expliquer (Cour Cass du 30 octobre 2013). L’employeur doit être vigilant. Si les faits commis par le salarié ne requièrent pas d’enquête ou d’investigations spécifiques, la procédure de licenciement doit être engagée rapidement.
« Un délai de 13 jours a été jugé, dans l’intérêt même du salarié indispensable, pour permettre à l’employeur de mener à bien ses investigations sur les faits reprochés sur un détournement des fonds et de se déterminer sur la nécessité d’engager une procédure de licenciement pour faute grave (Cass soc 13 septembre 2012).
• Si à l’issue de la procédure, vous faites un licenciement pour motif disciplinaire. Pour faute grave ou lourde : le non paiement de la période conservatoire est justifié
Pour faute simple : la mise à pied conservatoire doit être payée
– Vous faites un licenciement pour motif non disciplinaire : la mise à pied conservatoire doit être payée
– Vous ne licenciez pas, vous pouvez transformez la mise à pied conservatoire en mise à pied disciplinaire (totalement ou partiellement) et ne pas payer la période transformée en sanction disciplinaire. Sinon il faut payer toute la période de mise à pied conservatoire.
Si vous avez embauché un couple, sachez que la rupture du contrat de travail de l’un des membres n’entraîne pas la cessation du contrat de travail du conjoint même si vous avez inclus une clause d’indivisibilité. L’indivisibilité est appréciée au moment de la rupture du contrat et non de sa conclusion. Sort du logement de fonction : le partage d’un logement peut constituer un indice quant à l’indivisibilité des contrats mais pas suffisant, il faut que la réalité des tâches le confirme.
Quels montants de l’indemnité de licenciement pour motif personnel ?
La revalorisation pour le calcul de l’indemnité de licenciement pour motif personnel est actée :
– 1/4 de mois de salaire par an pour les 10 premières années d’ancienneté
– 1/3 de mois de salaire par an au delà de 10 ans d’ancienneté
Analyse du motif de licenciement :
- Le motif de licenciement, la perte de confiance : le motif de licenciement retenu doit être un élément objectif, basé sur des faits. La perte de confiance ne peut donc être qu’une conséquence découlant d’une erreur ou une faute.
La perte de confiance de l’employeur ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement même quand elle repose sur des éléments objectifs ; que seuls ces éléments objectifs peuvent, le cas échéant, constituer une cause de licenciement, mais non la perte de confiance qui a pu en résulter pour l’employeur (Cour Cass, 9 avril 2014)
- Le motif de licenciement, la qualification d’une faute grave : celle-ci résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié. Elle est suffisamment importante pour rendre toute relation de travail immédiatement impossible. Les cas où la faute grave est généralement admise sont l’abandon de poste, la concurrence déloyale, le dénigrement, l’insubordination, l’intempérance, la violence, le vol.
« la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise » (Cour de cassation, 27 septembre 2007).
- Le motif de licenciement, la perte du permis de conduire :
Le salarié qui s’est fait retirer son permis de conduire pour 12 mois alors qu’il était au volant de son véhicule personnel et qui s’est fait licencié pour faute grave au motif que sans permis, il ne pouvait plus exécuter ses fonctions. Sa décision a été sanctionnée car pour les juges cela relevait de sa vie privée. (Cass Soc 10 juillet 2013)
Le commercial qui s’est fait retirer son permis de conduire pour 6 mois et qui s’est fait licencié en janvier. Il a saisi la juridiction dès qu’il a récupéré son permis de conduire pour demander un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a obtenu gain de cause. (Cass Soc 13 juillet 2012)
A noter que seul un licenciement pour cause réelle et sérieuse (avec des indemnités de préavis et de licenciement) peut être prononcé en invoquant un trouble objectif lié au poste occupé par le salarié et au besoin de l’entreprise.
« Si le permis de conduire est nécessaire à l’activité professionnelle du salarié, la suspension du permis de conduire rend impossible l’exécution de la prestation de travail, y compris durant la période de préavis, rend légitime le licenciement (Cour Cass 28 février 2018) ».
Le licenciement salarié malade
Le licenciement, c’est possible mais pas pour maladie !
La maladie ne peut être en principe un motif de rupture, sauf s’il y a une inaptitude prononcée par le médecin du travail. Un licenciement serait jugé comme discriminant. Pour autant, il est toujours possible si vous le faites pour une autre raison.
Ainsi, s’il s’avère que, par la longueur ou la répétition des absences, le fonctionnement ou l’organisation de l’entreprise en pâtit, le licenciement salarié malade peut être envisagé, mais sous 2 conditions :
– la perturbation du fonctionnement de l’entreprise ;
– la nécessité de remplacer définitivement le salarié absent.
La durée de l’absence est laissée à la pure appréciation des juges :
Si une de ces conditions n’est pas remplie, le licenciement est reconnu sans cause réelle et sérieuse et vous vous exposez à devoir payer des dommages et intérêts au salarié.
Les questions à se poser avant d’engager une procédure car il vous reviendra de démontrer en cas de contentieux la preuve du préjudice subi et la nécessité de le remplacer.
Cette absence perturbe-t-elle réellement le fonctionnement de mon entreprise ?
Il faut pouvoir quantifier ou qualifier la perturbation pour engager le licenciement salarié malade.
Exemples :
– un cadre absent c’est souvent la désorganisation d’un service encore plus si c’est un chef de service
– un salarié qui a des compétences particulières ou une formation spécifique rendant son remplacement temporaire ou la répartition de ses tâches plus délicate.
– plus facile de démontrer la perturbation dans une TPE
– l’éventuel mécontentement des clients suite aux retards générés par l’absence
– la surcharge de travail pour les autres membres de l’équipe
Vigilance : la perturbation d’un service peut être jugé comme insuffisante pour justifier le licenciement salarié malade.
« La lettre de licenciement visait une perturbation dans le fonctionnement du service juridique dans lequel travaillait la salariée et non de l’entreprise, ce dont il résultait obligatoirement par une embauche en contrat à durée indéterminée (CDI)… le licenciement d’un salarié malade n’est justifié que si son remplacement est définitif.
que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse » (Cour Cass, 1 février 2017).
« Une perturbation du seul service de prospection et de fidélisation de la clientèle, sans constater le caractère essentiel de ce service dans l’entreprise, prive le licenciement de base légale. » (Cour Cass, 23 mai 2017).
Y-a-t-il des dispositions de garantie d’emploi prévues dans ma convention collective ?
Une clause de garantie d’emploi est destinée à garantir le maintien du salarié dans l’entreprise pendant une certaine période de maladie. Le licenciement salarié malade n’est donc possible qu’à la fin de cette période.
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